Monday, October 19, 2020

Sur les traces de Malcolm Fraser, chapitre 1.




J'ai toujours voulu porter un kilt. Pas juste pour le kick. Porter le tartan devait avoir un sens pour moi. J'avais trouvé un fournisseur à prix décent, mais pas encore de tartan significatif. Avant mon voyage vers le sud l'automne dernier, j'en glissais un mot à ma mère lors d'une discussion sur le sujet. "Mais on a un ancêtre écossais" qu'elle me dit.

Ah ouin, c'est vrai, Malcolm Fraser via mon arrière-grand-mère, Joséphine Bérubé Dubé. Elle était la femme de mon arrière-grand-père Joseph Dubé, notaire à Mont-Joli. Selon certains, c'était la version locale du JR dans l'émission "Dallas". Je me souviens, Joseph était aussi un grand patriote. On m'avait raconté un de ses rares voyages en dehors de Mont-Joli, où il était allé à St-Eustache pour visiter l'église. Un Dubé y avait péri lors de la révolte des patriotes en 1837. Si je vous raconte tout ça, c'est parce qu'il y a une grosse ironie dans cette histoire.

L'ancêtre de sa femme Joséphine, Malcolm, est débarqué à Québec via les Plaines d'Abraham en 1759 combattant avec le régiment des 78th Fraser Highlanders de l'armée britannique. Bin oui, si Montcalm gagnait la bataille, je n'existais pas!

Commençons par le début. Qui est Malcolm Fraser? Né en 1733 à Abernethy dans les highlands de l'Écosse de Donald Fraser et Elizabeth McIntosh. Son père Donald mourru à la bataille de Culloden lors du soulevement Jacobite contre la couronne britannique en 1746. Malcolm a alors 12 ans. On en sait peu sur la vie en Écosse de cet enfant, mais tout porte à croire qu'il a eu une position enviable dans la hiérarchie du clan. Par déduction, suite à mes recherches sur son histoire, il est éduqué, il a un bon sens des affaires et comme on le verra plus tard dans l'histoire, il est un homme d'honneur. Comme la plupart des Fraser bien placés dans le clan, il parle français.

Bataille de Culloden, source Wikipedia

La bataille de Culloden (1746) sera une défaite cuisante pour les highlanders écossais. Ce n'est pas la première révolte contre la couronne britannique qui en a sa claque. La réponse de Londres sera violente et décisive. Ceux qui auront survécu à la bataille seront tous éxecutés et les clans qui auront participé seront tous dépossédés par la couronne. Le clan Fraser ne fera pas exception à cette règle. Le système de clan sera démantelé et il sera même interdit par la loi de porter le fillibeg ou kilt. Le jeune Malcolm grandira pendant une période bien triste de l'Écosse.

En 1757, l'Angleterre est en guerre avec la France et cherche à créer un front en Amérique. Voyant là une opportunité de revenir dans les bonnes grâces de la couronne, le chef de clan des Fraser, Simon de Lovat, offre de lever un régiment composé de Highlanders pour combattre en Amérique. Il avait été gracié par le roi suite à la révolte Jacobite puisqu'il n'avait pas combattu à Culloden et était sous les ordres de son père, chef du clan à l'époque. Son père en perdra sa tête à la tour de Londres. Simon réussi en peu de temps à rassembler 1 500 hommes et on lui donne le commandement avec le grade de Lt-Colonel. Il obtient même la permission pour ses troupes de porter le kilt au tartan régimentaire. C'est pas rien.

Malcolm Fraser a alors 27 ans et peu de prospect devant lui. Il saute sur l'occasion et j'en déduis qu'il dépense chaque dénier qu'il possède pour s'équiper et partir à l'aventure dans le nouveau monde, broadsword à la main. Il achète une commission d'enseigne, l'équivalent aujourd'hui de sous-lieutenant. C'est comme ça qu'on devient officier dans l'armée britannique à l'époque, on achète sa commission. Il embarque donc avec le régiment vers l'Amérique en juin 1757 pour son premier combat qui sera le siège et la capture de Louisbourg en juillet 1758. 

Les couleurs du 78th Fraser Highlander Regt


C'est en trois chapitres que je vais vous raconter ce long récit. Mais d'abord, le pourquoi de mon soudain engouement pour le sujet. J'avais déjà commencé des recherches superficielles sur Malcolm Fraser lorsque j'ai appris qu'il était relié à moi. C'est en arrivant à Québec que j'ai réalisé que je pourrais suivre ses pas et peut-être localiser des emplacements exacts de son passage. Je n'ai pas été déçu. Dans le processus, j'ai ouvert une boîte à surprises remplie d'informations palpitantes que je partage maintenant avec vous.

Aquarelle de Marie-Suzanne Fraser de 1872. On y voit le tartan du clan et sa devise,"Je suis prêt".


Après avoir passé l'hiver à Sandy Hook au Connecticut suite à la prise de Louisbourg, Malcolm Fraser, devenu Lieutenant, embarque avec la flotte de Wolfe pour Québec le 4 juin 1759. Vous me voyez venir là? La flotte débarque enfin à St-Laurent sur l'Île d'Orléans le 27 juin. En route ils auront fait des arrêts au large du Bic, à l'Île-Verte et à l'Île-aux-Coudres. Le plan de Wolfe est de saisir Québec le plus vite possible afin de prendre Montréal en septembre, avant de se cantonner pour l'hiver. Son plan ira autrement. On trouve une note interessante dans le journal de Malcolm avant le départ pour Québec:  "J'ai entendu qu'un lieutenant à bord d'un des vaisseaux de guerre s'est tiré, par peur je crois, que les Français le fassent. S'il en avait assez de la vie, il aurait dû laisser le destin s'en charger de façon plus honorable." (Traduit ici de l'anglais par moi-même.) Le syndrôme post traumatique n'était pas connu à l'époque bien entendu.

La berge de l'Île d'Orléans


L'occupation des terres canadiennes commence à l'Île d'Orléans et sur la Rive-Sud de Québec, en particulier sur la pointe de Lévy. Wolfe installe ses troupes et commence à bombarder Québec avec l'aide de la Royal Navy. Les civils sont invités à ne pas participer au conflit et à continuer de vivre leur quotidien. Il n'en sera pas toujours ainsi. Québec se montre plus difficile à conquérir que prévu. Les forces françaises, canadiennes et autochtones sont plus coriaces que ne s'y attendait Wolfe. Certains habitants participent à des actes de résistance et la maladie s'installe parmi les troupes britanniques. Un méchant problème de gestion pour Wolfe qui s'en trouve affligé lui-même.

Malcolm Fraser se trouve impliqué dans plusieurs opérations qui l'ameneront de la Pointe-Lévy à la rivière Montmorency, attaquant les positions françaises qui donnent du fil à retrodre aux forces britanniques. Il n'est pas du genre à s'enerver trop trop et semble pas mal cool dans le feu de l'action comme en témoigne cette entrée dans son journal: "Dimanche 29 juillet,-Rien de remarquable, je l'ai échappé belle à Montmorency."

Il n'y a rien de beau à la guerre. Les Anglais vont occuper la Rive-Sud, l'Île d'Orléans et le territoire à l'est de la rivière Montmorency jusqu'à la bataille décisive des Plaines. Québec sera bombardé régulièrement et des villages seront brûlés, sauf les églises, soit en représailles ou pour des raisons stratégiques. L'Angleterre est le super pouvoir à ce moment de l'histoire et elle défonce comme un bulldozer dans une forêt. Des atrocités seront commises de part et d'autres. Malcolm Fraser le mentionne dans son journal, trois incidents retiennent mon attention.



Les troupes canadiennes et autochtones avaient la fâcheuse manie  de scalper les morts et les blessés des forces opposantes. On s'entend que côté guerre psychologique, ça avait de l'effet. Certaines troupes britanniques avaient décidé de rendre la pareille lors d'affrontements, en particulier les Rangers Américains commandés par Goreham. Malcolm était outré de cette méthode et Wolfe a dû passer un ordre interdisant la pratique, tout au moins sur les troupes ennemies en uniforme. Ce même Goreham avait capturé un habitant avec ses deux enfants et les avaient tués. L'action avait été justifiée par le fait qu'ils auraient supposément révélé leur position. Malcolm a qualifié l'action de meurtre et était enragé du fait que les troupes de Goreham en parlaient à la rigolade. Le 23 août à la bataille de St-Joachim, Malcolm est sous le commandemant du Capitaine Montgomery du regiment Kennedy. Il fait deux prisonniers à qui il garantit la vie sauve. Les deux seront exécutés par Montgomery que le jeune Lieutenant qualifie de "barbare". On voit que Malcolm Fraser est en effet un homme d'honneur malgré les circonstances.



Finalement, le 12 septembre, l'ordre est envoyé. Chaque homme doit amener munitions et deux jours de provisions pour ensuite embarquer sur les navires. Ils passeront la nuit à bord en attente du signal pour traverser le fleuve. Malcolm et ses compagnons s'apprètent à vivre un moment historique pour nous, mais térrifiant pour eux.  Je vous raconte la suite dans le Chapitre 2 la semaine prochaine.

On se reparle.

Gerry :)







1 comment:

  1. vu que tu est mon chum , je ne sortirai pas mes haines historiques des anglos ,,,,lolll,,,,quel beau récit , j attnd déja la suite !

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